La stratégie du choc ? Et maintenant, si nous faisions un ‘autre’ choc ? (3/3)

[ Suite des articles :

« la stratégie du choc ? Qu’est-ce réellement » (lien : https://laurent-dicale.fr/2020/06/02/la-strategie-du-choc-quest-ce-reellement/ )

Et de « La stratégie ? ça continue et certains veulent que cela continue encore plus ( lien : https://laurent-dicale.fr/2020/06/06/la-strategie-du-choc-ca-continue-et-certains-veulent-que-cela-continue-encore-plus-2-3/ ) ]

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Et aujourd’hui ?

Et maintenant ?

Certes, nous sommes a priori sortis de la crise sanitaire ; mais nous sommes aussi entrés dans une crise économique et une crise sociale qui s’annoncent toutes deux de grande ampleur ! Et qui s’ajoutent aux crises environnementale, sociale, climatique, éthique… que nous connaissons déjà.

En France, en Europe, de par le monde, nous sommes à un embranchement extrêmement important, face à un choix primordial.

D’un côté, un choc néolibéral dans sa plus pure tradition, dans la droite ligne de ce que préconise l’Ecole de Chicago et les néolibéraux.

De l’autre côté, un autre choc. Un choc que je qualifie (par ordre alphabétique) de climatique, d’environnemental, d’humaniste (dans le sens de placer l’humain au centre, d’en faire la priorité) et de social.

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En France, mais aussi en Europe, le choc néolibéral bénéficie de l’appui de nos dirigeants – dans la droite ligne des politiques qu’ils mènent depuis des décennies – et des législations et règlements qu’ils ont mis en place depuis des années et des années. Tous ont eu pour but de faciliter la vie (et favoriser les profits) des entreprises, plus spécialement les plus grosses et de permettre aux plus riches d’accumuler toujours plus de biens et d’avoirs. Est-il utile, à la fin de cette seconde note, d’en présenter une fois encore les conséquences ? Chacun les a bien en tête.

Ce choc néolibéral conduira à un jour d’après bien pire que le jour d’avant !

Nous devons être prêts à combattre toutes les mesures contribuant à ce choc néolibéral, sans relâche, sans fléchir, par tous les moyens à notre disposition.

Tout en sachant que les zélotes du néolibéralisme (i.e. notamment nos gouvernants, malheureusement !) vont essayer d’instaurer, aussi, le choc de la peur. Peur de perdre SON emploi – le mien, pas celui de mon voisin ou de l’autre, le Mien –, et plus généralement, la peur du chômage ; la peur de la perte du pouvoir d’achat ; la peur de la ‘récession’ ; la peur de la perte de compétitivité ; la peur d’encore plus d’austérité ; la peur des forces de l’ordre et de la Justice ; mais aussi la peur de l’Autre, la peur de l’inconnu, la peur du changement… Toutes les peurs qui pourront être mise en avant pour que nous ne protestions pas, pour que nous acceptions sans rien dire ce que ces fanatiques du capitalisme néolibéral veulent nous imposer, seront agitées !

Ce choc néolibéral a déjà commencé. Un exemple ?

Des entreprises, dont certaines de taille significative, ont d’ores et déjà annoncé qu’elles allaient utiliser le chantage à l’emploi une possibilité ouverte par les ordonnances Pénicaud modifiant le Code du travail de 2017 : les ‘accords de performance collective’ (expression qui constitue sans doute l’un des sommets de l’hypocrisie de la novlangue de ce gouvernement). Elles ne font toutefois que répondre ainsi à la suggestion de Muriel Pénicaud, Ministre du Travail, qui ‘(a appelé) les entreprises en difficulté à négocier des accords de performance collective’.

Le principe est vraiment, vraiment tout simple ! Le dirigeant dit : « on va négocier, bien sûr. Mais si vous ne voulez pas que je licencie 5% du personnel (ou 10% ou…), vous devez accepter une baisse de votre salaire de 5% (ou 10% ou…) pendant 5 ans. On va devoir aussi modifier votre durée de travail et ses modalités d’organisation. Il n’est pas exclu aussi que nous procédions à votre mutation professionnelle et/ou géographique. Bien sûr, je ne peux pas vous garantir que, pendant cette durée de 5 ans, nous ne serons pas conduits à procéder quand même à votre licenciement ou à envisager un nouvel ‘accord de performance collective’. Pendant ces 5 années toutefois, je continuerai à distribuer des dividendes, des stock-options et des bonus ainsi qu’à utiliser la trésorerie pour racheter des actions de l’entreprise afin que son cours en Bourse monte. Et puis, pour les investissements productifs et autres, on verra plus tard.

Eh ben, voilà ! Ah oui ! Si vous refusez de signer cet accord, je serai obligé, contraint, forcé (snif ! snif ! ; énormes larmes de crocodile en très grand nombre), de licencier 5% ou 10% de vos collègues ; et sans doute encore plus demain. Pensez à vous, à votre famille, à ce qui vous arrivera si vous êtes licencié ! Et ne soyez pas un salaud égoïste ; pensez aussi à vos collègues. Allez, signez ! »

Quel horrible chantage ! Quel ignoble outil ce gouvernement Macron / Philippe a-t-il mis dans les mains des plus zélotes des néolibéraux !

Ce gouvernement va bien sûr nous expliquer – certains de ses membres ont déjà commencé à le faire – que tout cela est fait dans l’unique objectif de préserver l’emploi. Pas de permettre à l’entreprise de faire porter par les salariés les difficultés de la crise, d’améliorer sa rentabilité et de réaliser rapidement plus de profits. Non, va-t-il marteler, il faut préserver l’emploi !

En fait, une politique totalement néolibérale, faussement annoncée mais totalement assumée. Toutefois, vu le contexte national et international actuel et les caractéristiques de cette crise économique, cette politique, qui est typiquement tirée de l’Ecole de Chicago et qui est la simple poursuite de celle menée avant la crise sanitaire, est très certainement vouée à l’échec ; nous serons alors tous perdants. Elle montre aussi que ce gouvernement ne semble pas avoir véritablement pris conscience des multiples et importants enjeux auxquels nous sommes confrontés.

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Les propositions pour que le jour d’après soit meilleur que le jour d’avant, pour que nous fassions un choc climatique, environnemental, humaniste et social sont nombreuses et couvrent vraiment tous les domaines. Elles permettent aussi de résoudre dans de bien meilleures conditions la crise économique actuelle, tant à court terme que sur le plus long terme tout en résolvant les enjeux et défis actuels. Elles émanent d’associations et d’organisations de la société civile œuvrant dans de multiples champs d’activité, de think-tank anciens ou qui se sont constitués plus récemment, de syndicats, de partis politiques (hum ! dont certains ont pourtant participé à la montée du néolibéralisme ces dernières années), d’économistes, de sociologues, de financiers, de philosophes, d’intellectuels, de journalistes…

Je n’ai pas la fatuité de vouloir présenter toutes ces propositions ou d’en synthétiser une présentation. Mais nous en connaissons tous certaines, voire un grand nombre. Et je suis persuadé que celles-ci suscitent votre adhésion, si ce n’est votre enthousiasme.

Nous devons être prêt à œuvrer, à agir pour que ces propositions soient étudiées, discutées, améliorées si besoin puis mises en œuvre. Réellement, concrètement mises en œuvre !

Et nous devons être prêts à combattre par tous les moyens non-violents à notre disposition mais avec courage et de façon ferme et résolue, toutes les mesures visant à amener un choc néolibéral.

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Vraiment !!! Faisons un CHOC CLIMATIQUE, ENVIRONNEMENTAL, HUMANISTE ET SOCIAL.

La stratégie du choc ? ça continue et certains veulent que cela continue encore plus. (2/3)

[ Suite de l’article : « la stratégie du choc ? Qu’est-ce réellement » (lien : https://laurent-dicale.fr/2020/06/02/la-strategie-du-choc-quest-ce-reellement/ ]

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De la crise des subprimes de 2008 à ‘avant-hier’ (avant la crise sanitaire)

Le livre de Naomie Klein s’achève au moment de la crise de 2008. De façon quasi-unanime, cette crise est perçue comme la conséquence directe de cette idéologie de l’Ecole de Chicago et de cette politique de dérégulation et de privatisation ; comme la conséquence directe du néolibéralisme. Ne partagent pas cet avis, même si ce n’est pas surprenant, les chantres du néolibéralisme dont font malheureusement partie nombre des gouvernants aujourd’hui.

Le choc des marchés et le choc économique qui ont suivi la crise de 2008 n’ont pas dégénéré en une brutale accélération de ces politiques néolibérales. Pendant un temps même, il a semblé que certaines dérives du passé pouvaient être corrigées ; on n’a eu droit en fait qu’aux trémolos, aux grands serments et aux manœuvres dilatoires de nos dirigeants !

Ainsi, cahin-caha, les théories néolibérales ont continué d’être mises en place, notamment en France. Je ne veux pas ici détailler la longue, très longue liste des mesures prises par les différents gouvernements sous les présidences de Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron. Tiens ! Juste pour le ‘fun’ : des lois liberticides ; des atteintes répétées au Code du Travail ; des mesures fiscales (nombreuses) favorisant les plus riches et d’autres affectant directement les classes moyennes et défavorisées ; la poursuite sous une forme larvée des privatisations dans de nombreux domaines, y compris régaliens ; les réductions constantes des services publics, tant en qualité qu’en quantité, avec notamment une réduction drastique des budgets consacrés à l’hôpital, à l’enseignement, à la justice, aux forces de l’ordre, à l’aide sociale, à la culture – euh ! à tous les secteurs en fait ; … Mais arrêtons là cet inventaire qui pourrait être continué très longtemps !

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Mais force est de constater que la stratégie du choc chère à Milton Friedman continue d’être appliquée.

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Ainsi en 2015, en Grèce qui est alors confrontée à une grave crise financière et bancaire – qui, d’ailleurs, aurait affecté au premier chef les banques commerciales françaises et allemandes. Un accord est ainsi imposé à la Grèce alors même que, par référendum, le peuple grec en avait rejeté les termes.

Pour avoir accès aux prêts dont elle a besoin pour ne pas être en défaut de paiement, la Grèce a dû accepter des mesures de libéralisation de l’économie et une grande austérité. Cela s’est en particulier traduit par des privatisations massives (banques, ports, aéroports, énergie, La Poste…), des réductions importantes des dépenses de l’Etat avec, entre autres conséquences, la diminution drastique des aides sociales apportés aux plus pauvres (dont le nombre a d’ailleurs fortement augmenté depuis 2015), la baisse importante du nombre de fonctionnaires dont les salaires ont été concomitamment baissés et la diminution des retraites. Cela a aussi induit des hausses des taux de TVA qui ont principalement touché les classes moyennes et populaires et une réforme de la fiscalité dont les plus riches n’ont pas eu à se plaindre.

Mais en plus, cet accord d’août 2015 constitue une véritable mise sous tutelle politique de la Grèce. Ainsi, Athènes devra «consulter les institutions [créancières] et convenir avec elles de tout projet législatif dans les domaines concernés dans un délai approprié avant de le soumettre à la consultation publique ou au Parlement ». Un total droit de regard des créanciers sur la politique intérieure grecque.

Le rêve des néolibéraux : avoir un gouvernement qui ne peut légiférer que lorsque cela ne nuit pas à leurs intérêts !!!

[ Sur le sujet des négociations ayant conduit à l’accord d’août 2015, je recommande le film de Costa-Gavras, ‘Adults in the room’. Edifiant ! ]

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Cette stratégie du choc, cette application brutale et forcée de mesures ultra-libérales et anti-sociales, voire anti-démocratiques, a aussi largement inspiré les grands organismes internationaux : FMI, Banque Mondiale, OCDE… Ainsi les réformes économiques – camouflées sous le beau et doux vocable de programmes d’ajustement structurel – que les pays en difficulté doivent mettre en œuvre pour bénéficier de prêts de la Banque Mondiale et/ou du FMI, sont clairement issues du corpus doctrinaire de l’Ecole de Chicago. Dit autrement, elles sont clairement néolibérales.

Cela a conduit dans ces pays à des politiques drastiques d’austérité qui, comme c’est toujours le cas, sont particulièrement douloureuses pour les classes moyennes et populaires ; à la privatisation de nombreux services publics et de nombreuses entreprises, au bénéfice quasi exclusif, fait-il le préciser, de multinationales occidentales ; à la libre-circulation des capitaux, des marchandises et des services sans que la suppression des barrières réglementaires et douanières ne se soit accompagnée de dispositions permettant de protéger les entreprises nationales, non préparées à une telle concurrence internationale ; à la déréglementation dans les domaines économiques, sociaux, environnementaux, financiers, fiscaux dans l’optique de faciliter autant se faire que peut, le fonctionnement des entreprises et des multinationales… Ceci, bien entendu, sans que les populations locales aient la moindre voix au chapitre !

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‘Hier’ (pendant la crise sanitaire dont on peut penser qu’elle tire sur sa fin)

‘All around the world’, la majorité des gouvernements ont appliqué pendant la crise sanitaire, la stratégie du choc ; non pas dans le domaine économique, mais dans celui des libertés ! Jouant sur la peur des citoyens face à la maladie et, surtout, face à la mort, les gouvernants ont imposé, le plus souvent sous surveillance policière quand ce n’est pas militaire, le confinement. Ce qui revient, en fait, à des privations de libertés avec la limitation des déplacements – voire l’interdiction de circuler –, l’interdiction de se rassembler – y compris dans le cadre familial – et l’interdiction de travailler ce qui, pour énormément de gens, en l’absence d’amortisseurs sociaux, revient à l’interdiction de gagner sa vie.

Car le discours mis en œuvre par nos dirigeants, c’est : « le gouvernement est le meilleur rempart, la meilleure protection contre le coronavirus. Il faut lui donner les pleins pouvoirs pour qu’il puisse lutter efficacement contre cette pandémie. »

Ainsi, nous sommes dans cette caricature – alors même que nous sommes dans l’Union Européenne – quand Viktor Orban, Premier Ministre de Hongrie, a fait voter une loi lui donnant les pleins pouvoirs et la possibilité de légiférer par ordonnances, sans aucun contrôle d’aucune sorte, pour une durée indéterminée. Les opposants sont ainsi accusés « d’être du côté du virus » dans les discours officiels. Cela est d’autant plus préoccupant que, depuis son arrivée au pouvoir il y a une dizaine d’années, Viktor Orban s’est illustré par ses multiples atteintes à l’Etat de droit et aux libertés de ses concitoyen(ne)s.

En France, ce gouvernement a tenu à montrer que cette mesure de restriction de libertés – aussi prise pour ‘masquer’ l’insuffisance des capacités d’accueil des hôpitaux et le manque de masques et de tests – a été appliquée avec toute sa force régalienne. Il a ainsi été très fier de communiquer sur le nombre de contraventions mises, signe selon lui qu’il luttait avec toute la rigueur nécessaire contre la propagation du Covid 19.

Toutefois, en France toujours, pendant cette période de confinement, ce gouvernement a continué de détricoter le Code du Travail. Certains membres de ce gouvernement, le MEDEF, des think-tank néolibéraux, certains élus des Républicains ont commencé leur lobbying pour que ces mesures, annoncées comme provisoires, perdurent,et même s’accentuent (cf. mon article du 23 mai sur ce blog : https://laurent-dicale.fr/2020/05/23/toujours-plus-de-detricotage-du-code-du-travail/ ).

On a vu aussi de multiples demandes, souvent par les mêmes, à ce que, au nom de la relance économique à venir, toutes les mesures écologiques, liées à l’urgence climatique et à la transition énergétique, soient suspendues sine die. Mais sur ces sujets, la plupart des actions se déroulent au niveau européen. Tout ce que Bruxelles et Strasbourg comptent de lobbyistes de tous les secteurs industriels et de toutes les organisations patronales, s’activent contre les mesures et les normes environnementales. Celles qui sont en discussion à l’heure actuelle ; celles dont la mise en œuvre doit intervenir prochainement ; mais aussi celles déjà appliquées et qu’il faudrait suspendre ! Tout est orienté pour que, au nom de la relance économique, on abandonne en Europe (et en France) toute ambition écologique, climatique, de transition énergétique.

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Et que dire de ces milliards d’aides directes et indirectes dont ont bénéficié de grandes entreprises françaises sans qu’en contrepartie, de réelles et sérieuses garanties environnementales ne leur soient demandées. Et sans qu’aucune garantie sociale n’ait été demandée non plus ; Renault, après avoir empoché les 5 milliards d’euros du prêt consenti par l’Etat via sa garantie, va fermer quatre sites en France !

Dans la loi de finances rectificative du 23 mars, un comité (un de plus) pour suivre et évaluer les mesures de soutien financier dont ont bénéficié les entreprises, a été institué et placé auprès d’Edouard Philippe, Premier Ministre. Parmi ses 14 membres (dont seulement 2 femmes) composés majoritairement d’élus, 2 représentants des organisations patronales (MEDEF et Union des Entreprises de Proximité – Artisanat) ; par contre, aucun représentant des salariés / des syndicats.

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Les entreprises de la haute technologie, les GAFAM et leurs lobbyistes ont réorienté leurs discours à l’occasion de cette pandémie pour se poser comme les meilleurs remparts contre les risques sanitaires, pour présenter ces technologies comme étant le seul moyen possible de mettre nos vies à l’abri d’une pandémie, comme étant les clés indispensables pour assurer notre sécurité et celle de nos proches.

Dans ce monde rêvé qu’ils veulent maintenant nous vendre et qui fonctionnera grâce à une « intelligence artificielle », tout sera livré à domicile, soit virtuellement via la technologie de streaming et de cloud, soit physiquement via un véhicule sans conducteur ou un drone ; l’enseignement à distance permettra de créer les meilleurs outils d’apprentissage et de faire bénéficier à tous de l’enseignement des meilleurs professeurs ; les dispositifs de télésanté permettront d’avoir accès aux meilleurs spécialistes… Tous ces services relevant, bien entendu, de la sphère privée / concurrentielle et étant payant. Mais cela nécessitant aussi beaucoup moins d’enseignants, de médecins, de conducteurs !

Mais ces entreprises de la haute technologie, ces GAFAM n’oublient pas leurs précédentes demandes : des infrastructures ultra-rapides et notamment, le déploiement de la 5G ; des citoyens connectés dont les données sont librement accessibles, utilisables – et monnayables ; des villes connectées et intelligentes gérant de façon autonome, à partir des informations collectées et stockées des citoyens, la circulation, les transports en commun, la distribution d’électricité et d’eau, le ramassage des déchets ainsi que les écoles, les hôpitaux et les commissariats ; etc…

Et ils réitèrent leur demande de levée des freins démocratiques, légaux, sociaux qui les empêchent de collecter et d’exploiter sans limite les données personnelles (y compris médicales) et d’explorer et développer sans contrôle certaines pistes que pourraient possiblement ouvrir le développement de certaines applications de l’IA ou de la reconnaissance faciale.

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Et aujourd’hui ? Et maintenant que nous sortons de cette crise sanitaire mais où nous entrons dans une crise économique et sociale qui s’annonce de grande ampleur ?

On continue comme avant ou on profite de ce moment pour faire une vraie rupture ? Pour faire un autre choc, un choc qui ne soit pas néolibérale ?

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A suivre donc !

La stratégie du choc ? Qu’est-ce réellement ? (1/3)

La théorie de la stratégie du choc a été présentée par Naomi Klein dans son livre – paru en 2007 – dont le titre complet est « La stratégie du choc : la montée d’un capitalisme du désastre ». Elle a prolongé sa présentation en 2009, au moment de la crise financière des subprimes, par un documentaire bâti autour d’images d’archives.

Naomie Klein nous explique que des désastres de tout ordre (catastrophes naturelles, guerre, attentats, coup d’état, répression policière ou militaire) plongent les populations dans un état de choc psychologique qui permet aux gouvernants, avant que les gens n’aient eu le temps de se ressaisir et de sortir de leur focalisation sur leur survie et sur l’urgence, d’appliquer, et j’ose même dire d’imposer, des réformes économiques qualifiées par l’auteure d’ultra-libérales ou hyper-libérales.

Nous dirions aujourd’hui, néolibérales !

Le corpus doctrinaire de ces réformes est issu de l’Ecole de Chicago dont la figure de proue est Milton Friedman. Cette doctrine est toujours celle à laquelle se réfère aujourd’hui encore les chantres du néo-libéralisme.

Comment peut-on résumer la doctrine de l’Ecole de Chicago ?

Lorsque Milton Friedman présentait (et louait) le programme de Margaret Thatcher, il disait : « (son) programme tient en quatre points : coupes dans les dépenses de l’état, baisses d’impôts, désengagement de l’état des secteurs de l’industrie et politique monétaire stable et raisonnable pour faire baisser l’inflation. »

Dans les faits, si l’on se contente juste de constater ce que cela a induit depuis 40 ou 50 ans, cette doctrine implique :

– Les privatisations – et ainsi, l’ouverture à la concurrence – dans tous les secteurs, y compris la santé, l’éducation, la sécurité, le logement social, l’eau, l’énergie, les transports urbains, ferroviaires et aériens, les télécommunications, la culture…Et donc le retrait de l’Etat et la dégénérescence de tous les services publics. Ah ! s’ils pouvaient privatiser la planète entière ! ;

– Le retrait de l’Etat aussi de ses missions régaliennes. Et donc leur privatisation ! ;

– La primauté accordée aux ‘marchés’ supposés efficients et parfaits par une déréglementation financière, bancaire, monétaire, économique, sociale, environnementale. L’« idéal » étant, faut-il le préciser, que les gouvernements soient totalement assujettis aux forces des marchés, leur rôle devant se limiter à supprimer tous les obstacles pouvant entraver leur libre fonctionnement ;

– Le sacrifice de l’environnement, de la nature et aussi, de tous les biens communs sur l’autel de la rentabilité à court terme ;

– Recherche de la rentabilité à court terme qui a conduit à mettre en place une concurrence effrénée entre les pays, les régions, les humains au détriment, s’il le fallait, de leur bien-être immédiat et futur et de leur développement et leur bonheur à moyen et long terme ;

– La marginalisation des syndicats et autres instances représentatives des salariés – mais aussi de tous les corps intermédiaires – laissant ainsi le salarié / le citoyen seul, sans appui, sans soutien ;

– Dit autrement, la destruction de la solidarité sociale, du lien social, du tissu social – en France, de la Fraternité ;

– Le creusement des inégalités, les plus riches s’enrichissant aux dépens des classes moyennes et laborieuses, dans un mouvement cumulatif sans fin ;

[ Et je dois certainement en oublier ! ]

Mais revenons vers le livre !

Quelles applications ont eu les théories de l’Ecole de Chicago ?

Les laudateurs et les apologistes du capitalisme néolibéral, celui que nous connaissons (subissons) à l’heure actuelle, se plaisent à mettre en avant les gouvernements de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan. C’est ‘politiquement correct’ mais surtout c’est commode car cela permet d’occulter ce qui s’est passé avant et depuis dans d’autres pays.

Ainsi, le premier ‘exploit’ de Milton Friedman et de l’Ecole de Chicago, le premier pays dans lequel ils ont appliqué leurs théories économiques de la façon la plus brutale est le Chili.

Lorsque Salvador Allende est renversé en 1973 par Augusto Pinochet – appuyé en sous-main par les Etats-Unis, inquiets pour les intérêts de leurs multinationales – les ‘Chicago Boys’ chiliens mirent en œuvre le programme économique qu’ils avaient préparé. Ils profitèrent pour cela du choc de la guerre puis du choc de la peur – et même de la terreur – basé sur la répression de la population, la persécution de tous les opposants de tout ordre et les multiples violations des droits de l’homme. Privatisations, coupes budgétaires, liberté de la circulation des biens, des services et des capitaux venant de l’étranger… Cette politique économique, passée en force, n’a pas marché et déclencha dans les années qui ont suivi, inflation, chômage et surtout, un fort accroissement des inégalités, les riches en bénéficiant au détriment des pauvres. Milton Friedman a pourtant qualifié les résultats économiques de la dictature d’Augusto Pinochet de « miracle chilien ».

Aujourd’hui encore, le Chili est l’un des pays les plus inégalitaires du monde. 1% de la population concentre plus du quart de la richesse du pays. L’accès à l’éducation et aux services de santé d’une large partie de la population est difficile, voire impossible. Fin 2019, des manifestations, parfois violemment réprimées, ont eu lieu et ont été très largement suivies. Les demandes portaient (et portent toujours) sur des réformes profondes du système économique chilien, sur une diminution des inégalités sociales, sur une augmentation des budgets de la santé et de l’éducation ainsi que sur une réforme du système des retraites, directement hérité de la dictature Pinochet. En fait, les revendications portent sur tout l’héritage de Milton Friedman et des Chicago Boys !

C’est le tour, en 1976, de l’Argentine à la suite du putsch militaire mené par le Général Rafael Videla et la mise en place d’une politique de répression féroce. Les Chicago Boys occupèrent alors les principaux postes économiques d’Argentine et mirent en œuvre leur programme ; ce qui entraina des bouleversements économiques et sociaux catastrophiques.

Milton Friedman déclarait pourtant que l’économie de marché allait de pair avec la liberté et la démocratie. Il affirmait que cette politique n’enrichissait pas seulement les élites mais créerait les sociétés les plus libres, que c’était une guerre contre la tyrannie, que capitalisme et liberté avançaient main dans la main. Le contraire de ce qui s’est passé au Chili pendant 17 ans ; le contraire de ce qui s’est passé en Argentine pendant 7 ans !

En 1979, Margaret Thatcher est élue Premier Ministre de Grande-Bretagne. L’année d’après, Ronald Reagan devient président des Etats-Unis d’Amérique. Je ne vais pas m’étendre sur ces deux périodes où le capitalisme néo-libéral le plus sauvage fut mis en œuvre.

Et après ? Ce fut la chute du mur de Berlin, l’effondrement de l’URSS et la chute du communisme en tant que système étatique.

Boris Eltsine prit la tête de la Fédération de Russie en 1991. Appuyés par ses conseillers surnommés, quelle coïncidence, les ‘Chicago Boys’, il mit en œuvre les théories économiques de Milton Friedman ; ce fut le chaos ! Les privatisations de secteurs entiers de l’économie russe dans des conditions douteuses et au profit de quelques ‘businessmen’ s’accompagnèrent d’une très forte baisse du niveau de vie du peuple russe, d’une grande paupérisation de larges pans de sa population et d’une quasi disparition de toute protection sociale. En 1993, afin de ne pas être destitué, il dissout avec l’appui des chars et des canons et avec la bénédiction des chefs d’états occidentaux, le parlement de Russie pourtant démocratiquement élu. Et le néolibéralisme fou des oligarques se déploya de plus belle !

Survint le choc du 11 septembre 2001 ! Un choc de civilisation ? Le Patriot Act fut alors adopté ; il diminuait un certain nombre de libertés fondamentales et dotait l’Etat de larges moyens de surveillance sans transparence et sans quasiment aucun contrôle. Et ce fut la guerre en Afghanistan et Guantanamo.

Puis ce fut, en 2003, la guerre en Irak. Dans ce pays, le choc de la guerre fut immédiatement suivi par le choc de la ‘thérapie économique’ imposée par l’administrateur américain. Dès les premiers mois, les lois classiques de l’Ecole de Chicago furent promulguées. Mais l’argent promis pour la reconstruction profita principalement aux sociétés américaines. La révolte grandissant et devenant de plus en plus violente, il y eut le choc de la répression avec arrestations arbitraires, internements sans jugement et tortures institutionnalisées. Mais cela n’empêcha pas les sociétés américaines, notamment dans le secteur de la sécurité et des armements, de faire des affaires… et des profits. On voit encore aujourd’hui les conséquences de ces années de gouvernance américaine.

L’une des ultimes recommandations de Milton Friedman en matière de politique publique date de début 2006, quelques mois après le passage de l’ouragan Katrina qui dévasta La Nouvelle-Orléans : « Les écoles de La Nouvelle-Orléans sont en ruine comme les maisons de leurs élèves. C’est une tragédie. Mais c’est aussi l’occasion de réformer radicalement le système d’éducation. » Il poussait en fait à la privatisation des écoles publiques de la ville !

Le livre de Naomie Klein s’achève au moment de la crise de 2008.

Dans un prochain article, nous verrons ce qui s’est passé depuis jusqu’à hier.

Ensuite, nous regarderons aujourd’hui. Et aussi, que va-t-il maintenant se passer ?

A suivre donc !

Enquêtes publiques « sans » public

Le gouvernement profite du confinement pour imposer des projets néfastes pour l’environnement et ainsi faire passer en catimini des projets fortement contestés.

Pour cela, ce gouvernement Macron / Philippe permet de mener des enquêtes publiques, ‘sans public’. Il fallait y penser, n’est-ce pas !

Les enquêtes publiques avaient été suspendues au début de la crise sanitaire. Mais le décret pris le 21 avril 2020 dans le prolongement de deux ordonnances publiées les semaines précédentes, autorise nommément plusieurs d’entre elles, à reprendre leur cours, compte tenu (je cite) « des enjeux de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé et de la salubrité publique, de sauvegarde de l’emploi et de l’activité et de préservation de l’environnement ». Il faut oser citer la protection de l’environnement quand on voit les projets concernés !

Mais là où, surtout, le bât blesse, c’est que ces enquêtes publiques devront se tenir uniquement sous forme dématérialisée. Pas de réunions publiques, pas de rencontres avec les parties concernées, pas de consultation en mairie des dossiers ; tout doit se faire par internet ! Et plus vite qu’avant !

« La participation du public est-elle considérée comme un frein inutile et un droit secondaire ? », déplorent conjointement la Compagnie nationale des commissaires-enquêteurs (CNCE) et la Commission nationale du débat public (CNDP). « C’est comme si la consultation du public était une formalité dont il faut s’acquitter le plus vite possible » dénonce l’association France Nature Environnement (FNE).

Les délais ont aussi été considérablement raccourcis. Ceci alors même que ces projets datent de plusieurs années et qu’ils sont confrontés à une opposition particulièrement forte des associations écologiques. Pourquoi une telle urgence maintenant ? Est-ce parce que, ‘comme avant’, ce gouvernement Macron / Philippe ne sait pas résister aux pressions des lobbies qui le demandent afin que, soi-disant, la reprise économique soit facilitée ? C’est en fait « pour autoriser au plus vite des projets destructeurs », s’insurge France Nature Environnement (FNE).

Prenons l’exemple de la centrale électrique du Larivot, en Guyane, pour l’installation de laquelle il faut « remblayer 24 hectares de mangrove (…) au milieu de nulle part », résume le porte-parole de FNE Guyane. La préfecture a décidé que l’enquête publique se tiendrait du 15 mai au 15 juin, de manière totalement dématérialisée en raison de la situation sanitaire. Pour ce projet où « il n’y a plus d’urgence depuis longtemps », le dossier d’enquête publique qu’il faut télécharger « fait 4.000 pages réparties en 70 dossiers. » Dossier « à lire en seulement un mois. On nous fait passer le projet en force ! ».

[ Au fait, c’est bien Emmanuel Macron qui se posait en donneur de leçons face à Jair Bolsonaro sur la destruction des espaces naturels ? ]

Mais on pourrait aussi citer le projet de l’élargissement de la RCEA (Route Centre-Europe Atlantique) dans l’Allier et de l’agrandissement de la carrière qui doit approvisionner le chantier. « Le projet date d’il y a plus de vingt-cinq ans ! Mais aujourd’hui tout est prêt à démarrer » constate le président de France Nature Environnement dans l’Allier. Il rappelle que l’Autorité environnementale (autorité de l’Etat compétente en matière d’environnement) a été très sévère sur la pauvreté du dossier en ce qui concerne les conséquences environnementales de cette future autoroute et que son président en recommandait la reprise complète. Dans Sa Grandeur, la préfecture a décidé de prolonger l’enquête jusqu’au 5 juin et indique que la tenue de réunion en présentiel dans les mairies concernées pourra être envisagée le moment venu, « sous réserve de la situation sanitaire » (sic !).

Ou encore de l’enquête publique sur la ligne 18 du Grand Paris Express à laquelle les associations environnementales s’opposent car, entre autres, elle pourrait faciliter l’urbanisation de terres agricoles sur le plateau de Saclay. Ou celle de l’usine à frites du port de Dunkerque alors qu’on connait les importantes nuisances environnementales causées par une usine similaire en activité en Belgique. Il faut signaler ici que la Préfecture a autorisé les participations du public non seulement par internet mais aussi… par courrier. C’est généreux, n’est-ce pas ? Et cela accroît considérablement le caractère démocratique de cette consultation.

Mais surtout, ces nouvelles pratiques d’enquêtes publiques où, sous le prétexte fallacieux de faciliter la reprise économique après le confinement, on fait le moins de place possible à la participation du public au motif que cela prend du temps, sont-elles limitées à la période de la crise sanitaire ou deviendront-elles la règle ?

Le caractère démocratique de ces consultations va-t-il être sacrifié sur l’autel du profit à court terme ? Car c’est à l’occasion de ces enquêtes publiques que les riverain(e)s et les usagé(e)s, tout simplement les citoyen(ne)s, peuvent prendre connaissance des projets, les étudier, les critiquer, faire des propositions, voire les combattre.

Cela sera-t-il comme avant ou pire ? Car, là, vu ce qui se passe, on ne peut que très difficilement imaginer que cela sera mieux qu’avant, tant du point de vue démocratique qu’environnemental.

Made in Bangladesh

Je viens de regarder ‘Made in Bangladesh’. Très très beau film !

Cette œuvre de la cinéaste bangladaise Rubaiyat Hossain raconte l’histoire de Shimu, employée du textile à Dacca au Bangladesh, qui décide, avec l’appui de quelques collègues de monter un syndicat. Ce film montre ainsi les conditions de travail très dures de ces ouvrières, l’exploitation dont elles font l’objet, les salaires de misère qui leur permettent tout juste de (sur)vivre, le délabrement des locaux dans lequel elles travaillent (l’une des premières séquences du film est celle d’un incendie qui se déclare et qui déclenche la panique).

Ce film aborde aussi la condition de la femme dans une société bangladaise, majoritairement de confession musulmane, au caractère patriarcal très fort : « nous sommes des femmes. Fichues si l’on est mariée, Fichues si on ne l’est pas ».

Dans son combat, Shimu doit ainsi se battre contre ses patrons, tous des hommes, d’autant plus virulents qu’ils ne veulent pas de syndicats dans leur usine et qu’ils sont pleins de préjugés machistes. Elle doit aussi se battre contre son mari (au chômage) pour pouvoir continuer à monter cette organisation syndicale. Elle doit enfin se battre contre une administration (personnifiée par une femme sans réelle pouvoir et par son chef, un homme), au mieux tatillonne et pleine d’inertie (volontaire ?), au pire corrompue.

Ce film effleure aussi le rôle libérateur de l’éducation. Par son étude du Code du travail, Shimu montre à ses collègues qu’elles peuvent lutter, ensemble en étant organisées, contre les abus qu’elles subissent (le décalage dans le paiement d’heures travaillées, le caractère illégal du renvoi d’une de leurs collègues).

Mais surtout, ce film, sorti en décembre 2019, est une dénonciation d’une mondialisation qui n’hésite pas à exploiter sans aucun état d’âme et sans aucune vergogne ces ouvrières.

Un dialogue entre Shimu et la militante féministe qui l’épaule dans son combat :

– « Combien de ces tee-shirts fabriquez-vous chaque jour ?

– 1650.

– Dis-toi que deux ou trois de ces tee-shirts valent un mois de ton salaire ».

Dialogue qu’il faut rapprocher de la visite de l’usine par deux donneurs d’ordres occidentaux. Ils s’inquiètent, sans insister, sur les conditions de sécurité mais surtout, ils font remarquer que les prix sont trop élevés ! Et accessoirement, que l’usine n’est pas conforme.

En novembre 2012, un incendie dans un usine textile près de Dacca a fait plus de 110 morts. Elle fabriquait des vêtements destinés pour la plupart à l’exportation vers les pays occidentaux. Elle avait pour clients des marques internationales du textile.

En avril 2013, 1129 employés du textile sont morts et au moins 350 autres ont ‘disparu’ dans l’effondrement du Rana Plaza, l’immeuble dans lequel ils travaillaient. Les entreprises clientes du Rana Plaza étaient aussi essentiellement des marques internationales d’habillement ou des groupes, notamment français, de la grande distribution.

Et on pourrait continuer longtemps le macabre décompte d’une multitude d’accidents n’ayant fait, chacun, ‘que’ quelques victimes !

D’un côté, l’industrie textile représente 80% des exportations du Bangladesh et emploie 4 millions de personnes, à 85% des femmes ; sans doute la main-d’œuvre la moins chère du monde. Mais cette industrie a permis de faire chuter de plus de 20% le taux d’extrême pauvreté dans le pays en une quinzaine d’années.

De l’autre côté, on peut facilement parler d’esclavage quand on regarde les conditions de travail et les salaires de ces ouvriers et ouvrières, encore aujourd’hui.

Quel dilemme !!! Continuer à acheter des vêtements venant du Bangladesh mais aussi du Pakistan, d’Inde, de Chine ? Ne pas le faire ?

Ou militer pour que les bénéfices qui profitent essentiellement aux groupes internationaux soient mieux répartis. Et notamment, qu’une part plus importante soit consacrée à une rémunération décente de l’ensemble de ces travailleurs et à la mise en place de bonnes conditions de travail et de sécurité dans les usines.

C’est sans doute une solution !

Toujours plus de détricotage du Code du Travail !

Ce gouvernement Macron / Philippe a profité de la crise sociale, dès son début, pour poursuivre le détricotage du Code du travail.

Et à l’occasion du déconfinement, il continue !

Il n’est pas utile, et ce n’est pas mon propos ici, de revenir sur les lois El Khomri d’août 2016 et sur les ordonnances Pénicaud de septembre 2017. Juste un commentaire : pas de grande différence entre les gouvernements Hollande / Valls et Macron / Philippe !

Fin mars, dans la loi ‘Urgence coronavirus’ matérialisée ensuite par des ordonnances, ce gouvernement est revenu sur certains acquis sociaux. Ainsi, « afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 » (pour reprendre la phraséologie officielle), ce gouvernement a décidé qu’un employeur peut imposer à ses salariés la prise de jours de congés payés. Pour ce faire, il doit néanmoins y avoir un accord d’entreprise ou de branche. Cela est une évolution positive par rapport au projet présenté initialement par Muriel Pénicaud qui excluait toute discussion avec les syndicats. Cette obligation pour le salarié, doit, heureusement, rester dans une limite qui est quand même appréciable : six jours.

L’employeur peut aussi modifier unilatéralement, sans concertation donc, les dates de prises de congés payés (et donc les fixer quand il le veut). Les textes vont même jusqu’à préciser qu’il n’est pas tenu d’accorder des congés simultanément au conjoint. Il peut aussi demander, sans aucune discussion ou concertation, que soient pris des jours de RTT ou des jours prélevés sur un compte épargne-temps.

Par ailleurs, dans certains secteurs d’activité, la durée quotidienne de travail maximale a été portée à douze heures et la durée hebdomadaire maximale de travail, normalement de quarante-huit heures, peut être portée à 60 heures !!! Dans le même temps, la limite de la durée moyenne de travail hebdomadaire sur 12 semaines a été augmentée de 44 à 48 heures qui est le seuil européen. Une fois sa décision prise de façon unilatérale et autoritaire, la seule obligation de l’employeur est d’en informer sans délai les instances représentatives du personnel.

Enfin, toujours dans ce même texte, il est autorisé de (nouvelles) dérogations à la règle du repos hebdomadaire le dimanche.

Et comme ce nouveau détricotage du Code du travail ne suffit pas, dans le projet de loi ‘Portant diverses dispositions urgentes face à l’épidémie de Covid-19’ qui a été voté à l’Assemblée le 15 mai, ce gouvernement s’attaque, cette fois, aux règles de reconduction des CDD. Ces changements interviennent sous le prétexte de l’urgence sanitaire. Vous voyez le rapport ? Moi, pas ! Cette loi vise en fait à abaisser encore plus les protections que peuvent avoir les salariés les plus fragiles et ainsi, à accroître leur précarisation.

Ce gouvernement annonce que ces mesures sont transitoires. Mais il a refusé d’inscrire une date limite dans ces deux lois. Certes, l’ordonnance 2020-323 du 25 mars 2020 indique que ces dispositions ne peuvent pas s’étendre au-delà du 31 décembre 2020. Mais…

Il faudra être particulièrement vigilant à ce que ce gouvernement ne prolonge pas ces mesures qu’il a lui-même annoncé comme étant ‘provisoires’, voire (je crains qu’il n’en soit capable) qu’il ne les rende définitives.

Car en cette période de crises sociale, économique et financière, où l’activité a été fortement perturbée par la période de confinement et continue de l’être avec les indispensables règles sanitaires qui doivent être prises, les assauts de ceux qui veulent encore plus de libéralisme ne cessent pas.

Ainsi, on a vu le ministre de l’Economie et des finances, Bruno Le Maire, dire qu’il faudrait ‘sans doute’ que le volume global de travail en France augmente. Et on a vu sa secrétaire d’Etat, Agnès Pannier-Runacher, inviter les français à mettre les bouchées doubles (i.e. à travailler plus) au sortir du confinement, pour rattraper les pertes liées aux fermetures d’entreprises.

On a vu le MEDEF par la bouche de son président, Geoffroy Roux de Bézieux, faire sa liste au Gouvernement Macron / Philippe au Père Noël : moins de jours de congés, moins de RTT, moins de jours fériés, plus d’heures travaillées. Tiens ! Une parenthèse : il n’est pas inutile de rappeler ici le courrier dans le même style que ce dernier a écrit à la ministre de la Transition Ecologique Elisabeth Borne pour demander un moratoire de six mois sur plusieurs dispositions énergétiques et environnementales qui devaient bientôt entrer en vigueur. On y voit la même volonté de s’affranchir des lois sociales et environnementales pour, à très court terme, maximiser les profits, quelles qu’en soient les conséquences.

On a vu l’Institut Montaigne, think-tank clairement ultra-néolibéral, plaider pour permettre aux entreprises qui le souhaitent d’accroitre le temps de travail. Bien sûr, l’Institut Montaigne indique que cela doit être sans sacrifier la question de sa rémunération ; mais il met en avant des dispositifs permettant de différer dans le temps, le paiement (qui peut n’être que partiel !) du temps de travail supplémentaire. Et il subordonne la mise en place de ces dispositifs à des accords négociés au niveau de l’entreprise. Quand on sait combien, dans les petites entreprises, le poids des syndicats à même de négocier de tels dispositions, est faible, voire inexistant !

On a vu Bruno Retailleau, président du Groupe Les Républicains au Sénat, proposer de passer des 35 heures aux 37 heures pendant un an.

Et je n’ai certainement pas tout vu et tout entendu !

Les pressions pour que ces mesures perdurent et même pour que d’autres soient prises, sont nombreuses. Elles se masquent cette fois, des impératifs de sortir le plus vite possible de la crise économique et financière pour justifier leurs demandes. Mais de quelle sortie s’agit-il ? Et à quel prix ?

Il va falloir être particulièrement vigilant à ce que ces mesures provisoires ne soient pas prolongées.

Il va falloir être particulièrement attentif à ce que le jour d’après ne soit pas pire que le jour d’avant !!!

Le jour d’après : pas comme le jour d’avant mais pire ?

On peut se poser la question !!!

« Le jour d’après ne sera pas un retour au jour d’avant » s’est engagé Emmanuel Macron devant 30 millions de françaises et de français le 16 mars 2020. Mais de nombreuses décisions prises par ce gouvernement Macron / Philippe font craindre que cela ne soit qu’une annonce, qu’un enfumage, que « les sanglots longs des violons de l’automne (qui ont troublé) mon cœur d’une langueur monotone » pendant le confinement ne se transforment à son issue, en une énoooorme et incontrôlable crise de larmes hivernale !

On pourrait ici établir un long et large inventaire de toutes ces décisions, de toutes ces annonces, de tous ces faits qui instillent le doute sur l’authenticité de la volonté de ce gouvernement Macron / Philippe à procéder à de réelles évolutions par rapport au ‘jour d’avant’. Mais je crains qu’il ne soit incomplet, trop synthétique, peu explicatif.

Ainsi, au fil du temps, sur ce blog, je reviendrai sur ces éléments qui font craindre que le ‘jour d’après’ soit ‘pire que le jour d’avant’. Je me laisserai certes guider par l’actualité mais je reviendrai également sur certaines décisions arrêtées, parfois sans aucune concertation démocratique car prises par ordonnance, depuis le début de la crise sanitaire. Et je remonterai plus loin dans le temps ; jusqu’à l’élection d’Emmanuel Macron et même au-delà. Je souhaite mettre en exergue tous les éléments qui alimentent notre suspicion et notre méfiance.

Je vais rapidement parler des attaques au Code du travail des toutes premières ordonnances de mars 2020 et de l’une des dispositions du projet de loi « portant diverses dispositions urgentes face à l’épidémie de Covid-19 » que l’Assemblée Nationale a voté le 15 mai. Le détricotage commencé par les lois El Khomri, continué par les ordonnances Pénicaud, se poursuit !

Je veux parler du scandale des ventes de masques par la grande distribution. Je veux parler des ‘magouilles’ du gouvernement pour faire avancer à marche forcée des projets néfastes pour l’environnement et très contestés. Je veux parler fiscalité et justice fiscale ; vaste sujet s’il en est. Je veux parler de la dette et des multiples options qui sont ouvertes aujourd’hui, si on veut les saisir. Je veux parler de cette société de surveillance que ce gouvernement installe petit à petit, sans qu’il y ait de réelle concertation démocratique…

Beaucoup de sujet à venir.

A bientôt donc !

Pourquoi je veux créer un blog ?

– Oui, Pourquoi ?

– Parce que !

– (Sourire narquois et un brin agacé)

– Parce que j’ai beaucoup de choses à dire !

Vois-tu. Depuis des années, j’ai envie de dire tout un ensemble de choses que je ne m’autorisais pas à dire avant. Par autocensure en fait. Je ne me donnais pas le droit, du fait de ma fonction à la Banque de France (sur mes deux derniers postes, j’étais directeur) de dire et de faire certaines choses, de m’impliquer dans certaines idées ou convictions.

Un exemple ? Je ne me voyais pas manifester le samedi (pacifiquement ! je n’aime pas la violence) et assister le lundi à une réunion à la préfecture avec la CCI et les banquiers pour envisager les mesures devant être prises pour aider les commerçants. Ceci d’autant plus que je comprends les manifestants (ou, tout du moins, les idées défendues lors de nombres des manifestations de ces dernières années) et les commerçants (et l’impact que peuvent avoir sur la solidité de leurs affaires ces évènements).

Et tiens, un autre exemple. Je n’étais pas toujours d’accord sur la teneur de quelques-uns des messages de politique monétaire ou sur les critères de Maastricht véhiculés par la BDF. Néanmoins, je les ai toujours transmis honnêtement et dans l’optique qui était celle de la BDF. En interne, je pouvais avoir des échanges avec mes collègues ; mais, à l’extérieur, je transmettais fidèlement le message.

Seulement, maintenant, j’ai envie de dire ce que je pense vraiment et qui peut être en contradiction avec ce que disent le Gouverneur et les dirigeants de la BDF. Et je pense avoir toutes les connaissances et les compétences pour le faire. Je ne suis certes pas un ‘Expert’ (avec un grand E et une profonde révérence), mais je sais de quoi je parle.

– Et encore.

– Plein de choses !

Je veux m’exprimer sur des sujets économiques et financiers, y compris ceux sur lesquels je me censurais parfois. Mais je veux aussi dire ce que je pense sur les problématiques environnementales et climatiques, sur des problématiques sociétales et sociales, sur ce qui se passe en France mais aussi en Europe et dans le monde, sur… pleins de sujets. Et cette fois, sans autocensure. Et en toute franchise, et sans langue de bois. Et sans colère même si parfois, ‘je m’enflamme’.

Je veux exprimer la façon dont je vois les choses et formuler des propositions pour que cela aille mieux, pour les corriger, pour les modifier. Tu vois ce que je veux dire ?

– Pas trop !

– Un exemple.

Je pense qu’à l’occasion de cette crise sur le coronavirus, la BCE prend des mesures tout à fait similaires à celles de la crise de 2008. Or les résultats sur l’économie réelle n’ont pas été à la hauteur des milliards et des milliards injectés et qu’on retrouve en partie sur les marchés financiers et spéculatifs, qui n’ont fait qu’alimenter la financiarisation excessive de l’économie mondiale. Je pense que des mesures comme l’effacement de dettes publiques détenues par la BCE permettrait de mettre en place des moyens de lutter efficacement contre la crise, non ! contre les crises induites par cette pandémie. Et aussi, de réparer les conséquences néfastes d’années et d’années d’une austérité imbécile, dont, par exemple, on mesure aujourd’hui les conséquences dans les hôpitaux. Et cela, bien sûr, en prenant en compte l’urgence climatique que beaucoup de gouvernants, maintenant encore plus qu’avant, ont envie de ‘mettre sous le tapis’. J’ai envie de parler de dispositifs comme la ‘monnaie hélicoptère’ à destination des entreprises et des ménages qui pourraient être mis en place. Ou encore des prêts directs aux Etats dans le cadre de projets à moyen et long terme bien définis de façon démocratique au niveau national et/ou européen.

Ou encore. Je ne suis pas d’accord avec la politique du gouvernement français qui distribue des milliards à de grandes entreprises sans aucune condition d’aucune sorte, ni environnementales, ni sociales, rien. Juste la nationalisation des pertes et la privatisation des profits, pour reprendre la formule consacrée.

Ou encore… sur l’écologie, la transition énergétique et le changement climatique, sur les changements nécessaires dans notre société et même, je crois, son indispensable reconstruction dans plein de domaines, sur la justice sociale dans toutes ses formes et sur les absences de justice sociale, sur la politique prise dans son sens étymologique de ‘science des affaires de la Cité’ et donc de ‘gestion de la Cité, de l’Etat’, sur l’économie, la monnaie et la finance bien sûr, sur l’international aussi, sur…

Sur tout ça, et sur tout un tas d’autres sujets, sérieux ou plus légers, petit à petit, j’écrirai sur ce blog.